Boulevard Soult
Créé en 1990, le DAL défend ses revendications par des réquisitions effectives d’immeubles vacants. L’une des plus célèbres occupations fut celle de la rue du Dragon en 1994. En 1996, des familles du DAL investissent un immeuble du boulevard Soult (porte Dorée, Paris). Les familles seront progressivement relogées en grande banlieue vers 2001. Je suis intervenu, avec d’autres militant·es, pendant plus de deux auprès des enfants de ces familles pour du soutien scolaire ou des sorties éducatives.
Matériel : Minolta dynax 500 SI ; Kodak T-MAX 400.
« Elle dit :
– La nuit quand il y a trop de bruit pour dormir, je mets mes chaussettes sur mes oreilles pour ne plus entendre.
Il y a des endroits au monde sans autre vérité que ce geste. Celui d’un enfant qui met ses chaussettes en boule dans ses oreilles pour ne plus entendre les cris.
Ici, cohabitent en attente de logements sociaux, familles déclassées par la crise, SDF qui tentent d’échapper à la rue, familles de sans-papiers… mais il ne suffit pas de ne plus dormir dehors pour bien dormir, surtout lorsqu’on s’installe avec des histoires cousues de ruptures, des bagages portés par des fantômes, et des mots lourds comme des cadavres. Alors quand un des occupants rentre bourré en gueulant comme un putois et en cognant à toutes les portes, à cinq ans on cherche ses chaussettes dans le noir et on se couvre les oreilles, parce qu’il y a des bruits trop effrayants.
Car la seule chose qui ruisselle, d’en-haut jusqu’ici, c’est la violence. »
— Un texte de Simon Tarsier (2000)